Peindre sous la lumière

En faisant de la lumière la condition naturelle de toute peinture, Leon Battista Alberti scellait le sort des images dans un geste qui aura porté bien au-delà de l'humanisme renaissant. Car ce qui s'énonçait au milieu du XVe siècle en matière de théorie de l'art ne visait rien moins que la constitution d'un nouveau régime esthétique tout fondé sur l'évidence, où l'artiste, désormais rival du philosophe, devient l'artisan du clair et du distinct. Ce livre part ainsi de l'hypothèse selon laquelle la peinture aura occupé une place stratégique dans la refondation humaniste de la pensée: comment en effet comprendre que la charge des premiers humanistes contre toute prétention métaphysique voire conceptuelle ait pu en appeler à la peinture? Poser cette question revient en réalité à dessiner une image de la pensée corrélative d'une pensée de l'image qui n'est pas seulement humaniste ou classique mais qui nous enveloppe encore aujourd'hui dans nos réflexes esthétiques et philosophiques les plus savants comme les plus spontanés. Et si ce livre peut également se lire comme un aperçu systématique de la théorie humaniste et classique de la peinture, ce n'est précisément qu'à la condition d'interroger archéologiquement le rapport de défiance que le discours sur la peinture entretient avec la théorie. L'enjeu? – entrevoir la possibilité d'une pensée de l'image qui ne se satisfasse pas d'une image orthodoxe de la pensée.