Conseils de lecture

Walker HAMILTON

L'Arbre vengeur

18,50
Conseillé par (Libraire)
27 avril 2023

Tout ce qui est petit est mignon.

Pour ce livre, ajouter essentiel et fragile est indispensable!
Quant à savoir si tout ce qui est grand est charmant, on peut sérieusement en douter!

Dans ce court roman se lie une amitié entre Bobby, jeune homme de 31 ans, très...détaché du monde... et Monsieur Summers, qui est une sorte d'ermite un peu braque.
Ces deux personnages de petites tailles, chétifs et parfois vacillants, se donnent pour mission de donner une sépulture aux petits animaux retrouvés écrasés sur les bords des routes. C'est une grande et noble tâche qui demande un travail intense, surtout durant la période des vacances où les automobilistes se font plus nombreux.
Ce roman plein d'humanité aborde, mine de rien, tous les grands sujets comme le droit à la différence, la pédophilie, l'écologie, la souffrance animale, l'avenir de l'homme ou encore la violence de nos sociétés.

Dans le genre roman d'apprentissage il y avait l'Oiseau canadèche de Jim Dodge, Les minuscules de Roald Dahl ou encore Tobi Lolness de Timothée de Fombelle, pour ne ce citer qu'eux, et bien désormais il faudra aussi compter sur cet auteur venu des Cornouailles, Walker Hamilton dont l'unique roman est proche, très proche du chef-d'œuvre.

Une première édition de ce livre est parue en 2000 aux éditions 10/18, il était traduit par Jean-François Merle que nous retrouvons ici.
En plus de nous permettre de pouvoir lire ce roman épuisé depuis longtemps, ce que nous offrent les éditions de l'Arbre vengeur se sont les touchantes illustrations de Mehdi Beneitez.

Enfin, une question se pose: conduirez-vous de la même façon après avoir lu ce livre?


20,90
Conseillé par (Libraire)
20 août 2022

Chienne de vie.

Un chien à ma table est un titre qui rend hommage à Janet Frame pour son autobiographie écrite en 1982 intitulée Un ange à ma table, œuvre rendue célèbre au cinéma grâce à Jane Campion.
Dans ce récit Janet Frame : « y affirmait-plus de douze fois- qu’elle n’était pas un être humain mais un oiseau migrateur que les humains effrayaient. » « Sa lecture, un choc, une totale surprise, la joie, avait légitimé en moi ce sentiment d’étrangeté qui me constitue en profondeur. »
Un chien à ma table est un roman porté par les travaux de Donna Haraway et Anna Tsing que Claudie Hunzinger connaît par cœur et il s’agit bien de cela, de la poésie de l’entremêlement, de l’imbrication et de l’internaturalité.
Un chien à ma table c’est l’histoire de deux « vioques » et d’une chienne nommée Yes : « Nous étions bien, nous, bande de bannis aux Bois-Bannis. Nous, complètement givrés. Totalement décalés. Nous deux, augmentés d’une petite chienne – pas même un loup. Nous deux devenus trois. »

C’est l’histoire de la bestialité humaine, de sa violence de son infinie aptitude à faire le mal et à détruire. Quand les animaux viennent avec leurs blessures et leurs peines, il nous faut oublier les nôtres ou les remplacer un temps.
C’est aussi l’histoire de notre monde, de sa fin probable, mais en l’attendant, chaussée de « Buffalo enchantées » Claudie Hunzinger nous convie à goûter la nature, absorber ses fluides, respirer ses mousses et ses champignons, vivre en entier, être des êtres libres de déguster ce monde minéral, végétal, animal et bien un peu humain quand même…

« Le potager était resté en friche. Nous n’avions pas l’idée d’y semer quoi que ce soit. Que mangions-nous ? Alors ou bien nous ne mangions pas, ou bien je n’en garde aucun souvenir. Ça n’avait aucune importance. Qu’est-ce qui avait de l’importance ? La liberté. Et la liberté. Et encore la liberté. La liberté chérie. Les friches, les vipères , les fossiles, le sphinx tête-de-mort, le petit-duc, les poèmes, les anémones pulsatiles. Et l’été. Des enfants et l’été. Que faisions-nous l’été ? Des cabanes. Ce n’était rien d’engagé politiquement, une cabane. Ni un poing serré ni un manifeste. »


21,00
Conseillé par (Libraire)
4 août 2022

Une vision de la sauvagerie*.

« Ma vocation, en tant que mère, sera de t'apprendre à être toi-même - et de respecter la vie sauvage en toi, enfant-chouette -, au lieu de te modeler à ma convenance ou à la convenance de ton père. Lorsque Tiny tombe enceinte, elle pressent instinctivement que son enfant sera différent. Le nourrisson, prénommée Chouette, est un bébé rapace. Comment élever cet être indomptable, l'accepter et l'aimer ?
Dans ce livre qui met le réel en panique on est aux frontières de plusieurs mondes; le fantastique, le surnaturel et le symbolique forment de vastes territoires où Tiny et l'enfant-chouette peuvent circuler à leur aise. Pourtant, à travers la présence du père de l'enfant-chouette, le "raisonnable", le probable tentent toujours de reprendre la main, d'imposer la norme, il faut quelques coups de bec ou de griffes instinctifs pour les éviter un temps.
Claire Oshetsky est romancière mais aussi musicienne, tout au long de Chouette elle nous fait partager de nombreuses compositions qui peuvent apporter un accompagnement sonore à la lecture, notamment avec Spiegel im Spiegel d’Arvo Pärt, Dance d’Anna Clyne, Silent woods d’Antonin Dvorak, Cantus Articus d’Einojuhani Rautavaara ou encore l’impressionnante et bouleversante Symphonie des chants plaintifs d’Henryk Gorecki. Il est vivement conseillé d’écouter ces morceaux en boucle tout au long de la lecture, d’autant que : « Tiny entend constamment de la musique, parfois dans son environnement, parfois dans sa tête. »
* Jean Hegland écrit dans la préface de ce livre qu'il donne :"une vision de la sauvagerie tapie au coeur de la vie domestique."


Laurence HUBERT SOUILLOT

La Grange Batelière

18,00
Conseillé par (Libraire)
15 juillet 2022

Des larmes de la plus belle eau.

Ce roman sera disponible en librairie le 8 septembre prochain. L'autrice viendra le dédicacer à la librairie le samedi 10 à 16h00. Marc Roger lecteur public viendra ce jour-là lire des extraits du livre de Laurence Hubert-Souillot.

Dans le roman Sans Famille d’Hector Malot, on rit et on pleure souvent, on dénonce la violence faite aux enfants, on aborde la relation avec les animaux, la vie difficile des petites gens, ainsi que le rapport au monde des artistes. Dans « L’Île des larmes », on retrouve tous ces sujets et le titre nous invite à garder près de nous un mouchoir pour en essuyer quelques-unes.

Notre héros ne s’appelle pas Rémi mais Baptiste, il a une quinzaine d’années et son rêve, qui va devenir réalité grâce à son oncle Ernest, est de devenir dresseur d’ours puis de donner des spectacles et d’en vivre car : « jamais je ne resterai un paysan. Jamais ! Plutôt crever. ».
Ce roman est rempli d’aventures, cela ne s’arrête pas, à chaque page un nouveau tableau, une nouvelle scène joyeuse ou triste, merveilleuse ou effrayante, mais toujours une aventure avec des personnages bosselés à l’envi.

Le roman commence en Ariège dans un petit village des années 1904-1906 et se poursuit à New-York, d’abord à Ellis Island, le passage obligé pour les migrants et qui va donner son titre au livre. Puis nos personnages vont se poser dans les bas quartiers d’une mégapole incertaine où la vie se fait dure, où chacun se débrouille comme il peut pour survivre.
Dans ce fracas, Baptiste et son ours Martin nous font vivre mille vies ; on est accrochés à ce qui leur arrive, alarmés quand cela se passe mal et soulagés quand le bien triomphe.
« L’Île des larmes » nous laisse émerveillés du spectacle, comme on le serait un soir d’été la tête dans les étoiles à observer la Grande Ourse.

Nancy Huston écrit dans « Instruments des ténèbres » : « chaque vie mérite nos larmes. »
C’est tellement vrai quand elles sont de la plus belle eau !


Jacques-Olivier Trompas

Au vent des îles

15,00
Conseillé par (Libraire)
8 juin 2022

Gugubarra ou le livre des rêves aborigènes.

Comment faire quand on se retrouve au mauvais endroit au mauvais moment dans un pays, l’Australie, dans lequel on vient d’arriver et que forcément on ne connaît pas ? Pour Antoine trentenaire un brin mélancolique cela vire au cauchemar assez vite, cette mauvaise rencontre va bouleverser sa vie.

Légué par son grand-père, Antoine possède un bel appartement place de la République à Paris, son compte en banque est assez fourni, cela lui permet d’être un jeune homme sans besoin, sans activité, sans réelle préoccupation sinon celle de soigner ses blessures d’enfance et son sentiment de culpabilité envers sa famille.
Cela lui laisse le temps de s’intéresser un peu au monde autour de lui qui est fait de manifestations, de grèves et de colères sociales. Place de la République les braseros chauffent le ciel et les esprits. C’est ainsi que son destin va l’emmener de Notre-Dame-des-Landes à Kalgoorlie, petite ville minière située dans le bush australien.

Gugubarra est un roman initiatique. Le grand-père d’Antoine était ethnologue, bien des années avant il est venu dans la région, il a côtoyé les aborigènes, écrit sur eux et tenté de défendre leur droit à tout simplement exister : « Faire société, c’est être capable de comprendre l’autre, l’empathie, Antoine…et c’est accepter des règles communes. Pour les aborigènes, les règles australiennes ne sont pas communes, elles ont été plaquées sur eux comme de la peinture sur de la poussière… »

Gugubarra est un oiseau, un martin-pêcheur au cri si particulier, presque humain, criard et communicatif : « Au début, Antoine, il n’y avait que la nuit…Le grand créateur Baiame se dit que les êtres vivants aimeraient avoir la lumière. Alors il entreprit de faire un feu gigantesque pour créer le jour. Mais avant, par crainte d’effrayer les animaux avec cette lumière nouvelle, il chargea Gugubarra de lancer son cri pour faire savoir que la lumière allait arriver. L’oiseau se mit à crier et réveilla tous les habitants de la Terre qui purent assister au premier embrassement du ciel. »

Pour Antoine Gugubarra c’est ça, sortir de la nuit pour aller vers la pleine conscience de soi. Trouver sa voie et son cheminement intérieur. Ce livre de Jacques-Olivier Trompas fait un bien fou.